Discrimination à la Réunion.
Discriminations : la couleur politique en tête
Couleur politique, origine, handicap, harcèlement sexuel sur des femmes… : ces cas de discriminations sont les plus courants dans l’île selon le Défenseur des Droits à la Réunion. La première place, allant au positionnement politique. Didier Lefevre reçoit un millier de réclamations par an.
Une employée mise au placard parce que son mari n’affiche pas la bonne couleur politique, c’est à La Réunion que ça se passe. Et ce n’est pas un cas isolé. L’année dernière, le Défenseur des Droits (DDD) du département a ainsi reçu plusieurs réclamations de ce genre. Et lorsqu’il estime qu’elles sont fondées il émet des recommandations très claires.
Comme dans ce cas d’une réclamante qui avait “fait l’objet d’agissements de harcèlement moral, tels que le retrait de toute attribution pendant plusieurs mois, sa “placardisation”, l’affectation dans un bureau exigu impropre à des conditions de travail…”, selon les conclusions du Défenseur. “De tels agissements sont directement en lien avec le positionnement politique de son époux, concomitants à la prise de fonctions de la nouvelle municipalité. Ils induisent une réparation intégrale des préjudices subis. C’est pourquoi le Défenseur des droits recommande au Maire de procéder à l’indemnisation pécuniaire ou par équivalent, des préjudices matériels et moraux subis par la réclamante”. Vous l’avez compris, cette situation s’est déroulée dans une mairie. Et l’on sait que la discrImination politique culmine en période de changements de majorité. Les exemples à la Plaine-des-Palmistes ou encore au Foyer de Terre- Rouge le montrent bien. Cela n’étonne guère Jean- Pierre Lallemand, responsable de la SAFPTR (Syndicat Autonome de la Fonction Publique Territoriale de la Réunion). Il dénonce notamment la loi selon laquelle un maire peut embaucher n’importe quel quidam comme fonctionnaire de catégorie C. Et de citer le cas d’une mairie sudiste où le premier magistrat a embauché 600 agents (des militants ?) dans la fonction publique territoriale sans que certains passent le précieux concours.
“UN CLIENT VOULAIT UNE ASSISTANTE SEXY”
En 2015, à la Réunion, les discriminations à l’embauche, toutes raisons confondus, représentent une réclamation sur dix reçues par le Défenseur des Droits. Soit une centaine de dossiers, sur le millier qui lui sont adressés. “Sur ces 100 dossiers, la moitié ont fait l’objet d’une réorientation ou d’une clôture, la moitié ont fait l’objet d‘un règlement amiable ou d’une instruction approfondie”, explique Didier Lefevre.
Les deux tiers des affaires réglées ou toujours à l’instruction concernent l’emploi public. Par ordre d’importance,c’est précisément l’opinion politique qui arrive en tête, devant l’origine, le handicap, l’activité syndicale, l’appartenance au sexe féminin… Dans l’emploi privé (30 % des dossiers), les discriminations sont d’abord liées au handicap, puis à l’état de grossesse, l’activité syndicale, la situation familiale et les moeurs, le harcèlement sexuel… Les 5 % qui restent concernent l’accès à un service public ou privé (critère handicap). Au total, le législateur a retenu vingt critères de discrimination (lire par ailleurs). Mais il n’a pas inclus dans cette liste le style vestimentaire alors que le “look” d’un candidat est important lors d’un entretien.
“Pour moi, c’est le premier regard sur le ou la candidate qui compte. Il est important que la personne qui postule pour un poste soit bien habillée”, explique Catherine, responsable RH à Saint- Denis. Parfois, ce sont les patrons qui ont des exigences bien particulières. “Un jour, un client voulait une assistante de direction. Il a demandé une fille sexy. Je lui ai demandé si c’était pour les heures supplémentaires… et d’aller chercher dans un autre cabinet de recrutement”, raconte Gérald, chasseurs de tête.
Mince, obèse, noire, blanche. quelle que soit la discrimination, il faut avoir des preuves tangibles si on décide de saisir le Defenseur des Droits. Tout le monde ne fait pas la démarche jusqu’au bout. “J’ai vu des gens venir me raconter le problème mais ensuite, ils ont refusé qu’on agisse. Une personne a dénoncé le comportement de son directeur pour harcèlement sexuel mais elle a eu tellement peur d’avoir à témoigner devant le tribunal qu’elle nous a demandé de ne rien faire”. La démarche, elle, demeure gratuite.
Source : clicanoo.re